Assise sur le banc

Assise sur le banc j’attends. J’entends quelques notes de tuba par les fenêtres à côté de moi. J’ouvre grand les oreilles pour entendre si mon grand ne fait pas « trop de bruit ». Ça fait 2 mercredis que j’attends.

2 mercredis que j’attends sur ce banc pour un essai de cours de musique. 2 mercredis que je m’efforce de présenter tout cela à mon fils comme  » on a une activité cool aujourd’hui » alors que non, c’est des tests. Tester voir si c’est possible. Voir si il peut prendre des cours de musique avec des petits camarades, voir si c’est possible pour lui de rester dans le groupe. Le prof est sympa et cash, ça me change. Il veut vraiment essayer avec mon gamin qu’il m’a dit, mais il a 10 autres élèves alors faut voir. 

Ça fait 2 mercredis que sur ce banc je me ronge les sangs. C’est que je lui ai promis à mon musicien en herbe : il va faire de la musique. Il est grand, 6 ans maintenant, il y a le droit à son activité plaisir. Pas que la psychomot, l’orthophonie et toutes ses prises en charge qu’il fait depuis toujours ou presque. Non, son activité plaisir, sa passion. Il a le droit de s’amuser. Alors il en fera de la musique, d’une manière ou d’une autre.

Mais oui, là j’attends sur mon banc et j’ai peur. Peur qu’on me dise que dans le groupe ce n’est pas gérable. Peur qu’il n’ait pas sa place. Oui je trouverai un prof particulier à domicile s’il le faut, et on réessayera les cours l’année d’après. Mais j’ai tellement envie. Tellement envie qu’il soit intégré, qu’il puisse vivre et ressentir son amour de la musique avec d’autres. Tellement envie que ça se passe pour lui comme pour les autres…

J’attends sur mon banc et je me dis que je lui ai repéré mille fois à mon feu follet « reste sage, sois attentif, ne touche pas à tout, écoute le prof ». Je sais qu’il fait ce qu’il peut. Je le sais mais parfois j’aimerais qu’il fasse plus c’est vrai. Je sais surtout qu’il m’en parle tout le temps de ce cours de musique, des étoiles dans les yeux. Cet enfant qui tambourine sur tout ce qu’il trouve depuis qu’il sait marcher, qui veut écouter de la musique en permanence, qui ne comprend pas pourquoi je ne peux pas lui montrer comment jouer du piano.

J’attends sur mon banc et je me dis que le prof avait dit qu’on pourrait faire un troisième essai si besoin. J’attends sur mon banc et j’espère, et je me dis que c’est pas grave si ça ne le fait pas, et j’espère encore. J’attends.

Tout ça c’était en septembre.

Aujourd’hui aussi j’ai attendu. Dans la voiture, il pleuvait.

A la fin de son cours, il m’a dit qu’ils avaient chanté “Tous les animaux du monde” et “Gaston y a l’téléfon qui son”. Son prof m’a dit “de toute façon avec la musique y a tout qui va, y aurait jamais d’guerre, tant qu’on aime ça ça ira”.

Ça ira. Dites moi que ça ira. Ça et tout le reste.