Pendant des jours et des jours, ma vie s’est résumée à traverser des couloirs. Des couloirs d’hôpitaux qui me semblaient longs à n’en plus finir. Et la chambre au bout du couloir. Mon fils, mon tout petit, mon bébé chat.
Le premier couloir était surtout une expédition. Il fallait me sortir du lit. M’asseoir dans cette chaise roulante où j’étais si mal, gérer les à côté si désagréables. Traverser le couloir. Attendre l’ascenseur. Traverser d’autres couloir. Arriver devant cette bulle qu’était la néonat de l’hôpital de niveau 3, me lever du fauteuil, trouver la force de rester debout le temps de me laver les mains selon le protocole, passer le sas, traverser un dernier couloir et rentrer dans cette chambre où il était, mon tout petit qui semblait géant face aux prématurés voisins, branché de partout. Rester 20 minutes, 35 minutes, 1h les jours de grande force. Refaire tout le trajet et pleurer.
Le deuxième couloir est devenu une routine. La néonat de l’hôpital près de chez nous était tout au bout du couloir de l’aile de pédiatrie. Marcher le long des ses murs aux couloirs roses était toujours une épreuve. On y allait à reculons, on en partait tout aussi lentement. L’envie de ne plus aller à l’hôpital était toujours présente, comme si on voulait baisser les bras. Mais bien entendu, l’envie d’être avec notre fils était plus forte que tout, même si faire connaissance avec son tout petit dans un tel cadre est une expérience particulière. On avait en tête que c’était une épreuve, longue, éprouvante, mais que quand ça serait fini ça serait fini.
Le troisième couloir a été celui de la bascule dans un autre monde. On l’a traversé dans un sens la toute première fois, hébétés, mais pensant qu’on avait “juste” un bébé qui n’arrivait pas à manger, que c’était “juste” des difficultés. On en est ressorti 1 mois plus tard avec un bébé atteint d’une maladie rare. Une autre vie. Ce couloir ci, on le traversait vite, très vite. Très vite le matin pour aller le retrouver. Très vite le soir quand je partais, toujours en premier, laissant mon fils 1 minute seul avec son papa, pour que je n’ai pas à gérer ce sentiment de le laisser seul. C’était un long couloir. Ils étaient 4 tout au bout. On a compris après. En face il y avait une petite fille qui pleurait tout le temps, beaucoup. Et à côté, pareil. Tous sont restés des semaines, et même encore après nous. C’était le bout du couloir. Ceux devant lesquels les médecins avaient des visages fermés.
Aujourd’hui encore, je traverse les couloirs de l’hôpital avec le cœur au bord des lèvres. Certes, ils n’ont plus cette emprise si forte sur moi, qui ne me quittait jamais, car ils ne sont plus quotidiens. Mais je revois toujours cette chambre au bout du couloir.
20 comments
On se connait pas mais tant pis… je te serre fort dans mes bras.
Merci <3
On ne se connait pas mais la fin de ton texte fait terriblement écho en moi.
Ces couloirs tant détesté et qui au final on aussi représenté un « après »
j’ai toujours une boule au ventre quand on y retourne pour des controles
je crois que je me souviendrais toujours de l’odeur, de la lumière , de l’atmosphère…
bref des bises 😉
Je n’aurais jamais pensé qu’on puisse être marqué par un lieu comme ça, c’est presque du détail, et pourtant…
Beaucoup de courage ma belle !
Merci <3
Toujours aussi émouvant tes textes..
Merci <3
Poignant ton article Charlotte, comme tous mais celui-ci encore plus. J’imagine cette douleur qui vous a transpercé, on ne peut que l’imaginer mais quand même. Plein de bisous
Merci Charlotte <3
Des bisous et des câlins
Merci <3
Et au bout de ce couloir, il y a nous, les visages anonymes mais bienveillant qui te soutiennent et pensent à toi. ♡
Oui, merci 1000 fois pour tout ça <3
Quelles terribles épreuves. J’espère de tout cœur que ces couloirs sont loin et que les prochains sont ceux de la maternelle!
Je l’espère aussi, même si je pense que ça sera une étape compliquée ça aussi… L’avenir nous le dira !
Je rentre de vacances et rattrape mon retard de lecture… le coeur bien serré en te lisant. J’espère que ces couloirs disparaîtront bientôt tout court de votre vie, même si le fait qu’ils ne soient plus quotidiens est déjà un grand pas !
Excuse moi Marine, je m’aperçois que j’avais laissé ton commentaire sans réponse ! Effectivement, le fait qu’ils ne soient plus quotidiens change beaucoup la donne, même si à chaque rendez-vous à l’hôpital j’y repense… Cette petite hospitalisation a réveillé pas mal de choses en moi, mais le résultat de l’opération de mon fils est à la hauteur des espérances, son audition est revenue dans la normale, donc ça valait le coup de stress !
<3 Je ne sais pas quoi te dire sinon que je t'envoie tout le réconfort possible…
Merci beaucoup ! Ces épreuves me paraissent loin désormais, tout cela est derrière nous, même si parfois le passé revient me hanter. C’est fou de se dire qu’on a vécu tout ça… Mais pourtant, on est là, on est bien, et mon petit chat va devenir grand frère ! On vit de beaux moments malgré tout 🙂