Je vous parlais la dernière fois de ce “bébé d’après” l’annonce du handicap. Mais si envisager ce “bébé d’après” s’est fait avec du temps mais dans une forme de douceur, envisager la grossesse d’après ça… C’était clairement un autre challenge.
C’est clairement ce qui me faisait le plus peur. Vivre une autre grossesse. Vivre une autre grossesse en sachant. Que non, toutes les grossesses ne se passent pas bien. Qu’on peut mourir lors de l’accouchement. Que le handicap, ça n’arrive pas qu’aux autres. Si j’avais très envie d’un autre bébé, je me suis vraiment demandé comment j’allais supporter une nouvelle grossesse. Je n’avais pas un rejet total à l’idée d’être enceinte, mais j’avais peur. Peur de perdre la tête, de vraiment ne pas supporter de me lancer dans l’inconnu.
Je savais qu’il y avait le risque que je surinvestisse cette grossesse, le fameux fantasme de réparation dont je vous parlais. Je savais qu’il y avait le risque que je ne sois jamais rassurée par aucun examen, par aucune échographie, que le “tout va bien” soit suspect, que “il y a quelquechose mais à surveiller” le soit encore plus. C’est probablement ça qui me faisait le plus peur, de me dire que l’histoire pouvait se répéter bien entendu…
Je ne vous ai pas caché que j’ai eu peur, oui, clairement. Mais je ne sais pas. Apprendre qu’ils étaient deux a été un électrochoc. Soit je me laissais couler et happer par mes angoisses jusqu’à perdre la raison, soit je faisais abstraction. C’est ce que j’ai fait, inconsciemment, sans trop savoir pourquoi ni comment. J’ai “compartimenté” mon cerveau. J’ai mis toutes mes terreurs d’un côté, et je les ai emmurées. Je les ai ignorées, autant que j’ai pu, pendant toute ma grossesse ou presque…
Pour tout vous dire, je ne suis pas certaine que c’était la meilleure manière de vivre cette “grossesse d’après”, mais je n’ai pas su faire autrement. Cela m’a permis de voir ces mois se dérouler à peu près normalement. De pouvoir profiter un peu plus. Les échographies ont fini par devenir de bons moments. J’ai mis de côté ma peur de la prématurité. J’ai même réussi à faire ma séance photo de grossesse. Je n’ai pas totalement totalement paniqué face à ma valise de maternité, même si ça a été long de m’y mettre. Du positif donc. Alors pourquoi dire que ce n’était pas la meilleure manière de faire face ?
Tout simplement car tout ça n’a pas parfaitement tenu. La fin de grossesse a été compliquée, je sentais que j’arrivais au bout, que le mur se fendillait et risquait de tout emporter avec lui. Le jour de l’accouchement, j’ai craqué, plusieurs fois, la peur a voulu me paralyser. Parce que je sens, maintenant, que trop de choses ne sont pas digérées, pas acceptées.
J’ai fait ce que j’ai pu pour cette grossesse d’après. Je ne sais pas comment j’aurais pu faire autrement…
9 comments
J’imagine que parfois le cerveau se met en mode survie et que c’est ce qui t’es arrivé. Tu n’as jamais parlé de tout ça à un psy, ne serait-ce que le psychologue de la maternité ?
Pour tout te dire, j’ai toujours trouvé ma psy plus enthousiaste que moi tout au long de cette grossesse ^^ Sur la fin je ne pouvais plus me déplacer jusque chez elle, et je n’y suis pas retournée depuis, alors que c’était probablement les périodes les plus compliquées, du coup^…
Bonjour ce post me touche beaucoup car nous sommes en train de vivre des jours très durs. Je suis enceinte mais nous avons appris que notre petite fille est atteinte d’une très grave malformation.nous allons faire une interruption de grossesse dans quelques jours.. ce moment viendra où se posera la question de l eventuelle grossesse d’après… heuteusement nous avons la chance d’avoir deja un fils de 3 ans en bonne santé, sa bonne humeur m aide à traverser tout ça.
C’est pas la même histoire que vous, mais va m amène à penser que la maternité est faites de grandes joies et de grandes peines quelque soit l’histoire de chacune…
Bonjour Julia. Je suis vraiment désolée pour vous, je ne peux qu’imaginer les moments terribles par lesquels vous passez… Je vous souhaite beaucoup de courage ! Vous avez raison sur la maternité, ce n’est pas un seul et unique statut. Les grandes peines font partie de notre histoire. Je vous souhaite de voir le bonheur à l’horizon. Courage.
Tu as fait comme tu as pu, avec ton ressenti.
Je me pose la question. J’ai mon bébé extraordinaire et je sais que je devrai sans doute renoncer à une deuxième grossesse pour le moment car la prise en charge est lourde. J’ne rêve pourtant d’un deuxième mais me connaissant, je sais que si j’ai cette chance, je ne pourrais m’empêcher d’avoir peur et de me dire « et si la même chose se produisait »!
bises à toi
Et c’est tout ce qu’il y a de plus normal d’avoir peur, comment faire autrement… Après, quand l’envie prends le pas sur la peur, c’est qu’on est prêts à se lancer, en tout cas c’est comme ça que j’ai pris les choses. Comme toi, la prise en charge me fait parfois culpabiliser envers ses petits frères, c’est un temps que je ne pourrais jamais leur consacrer. Mais les choses sont comme elles sont, c’est épuisant de lutter contre le courant à se dire « et si », donc on fait avec. Ce n’est pas simple au quotidien, mais on fait avec. Et je suis sûre que pour eux ça sera finalement un élément de leur vie, ni plus, ni moins. Je te souhaite d’agrandir ta fratrie quand vous sentirez que c’est le moment <3
Chez moi le fantasme de réparation a fait que l’envie du deuxième est arrivée très vite. Le premier était comme il faut, c’est juste que j’ai eu une grossesse angoissée, j’ai tenu beaucoup de choses à distance et j’idéalisais une grossesse épanouie, un coup de foudre avec le nouveau né, une complétude parfaite.
Et puis ma deuxième grossesse n’a pas été top et l’accouchement une catastrophe (complication de grossesse, césarienne en urgence, prématurité, hospitalisation de presque un mois pour le bébé). Bref, ça n’a rien réparé, bon, au moins ça a réhabilité la première grossesse (finalement c’était pas tout pourri).
Et puis je m’étais dis que si le deuxième était encore un garçon, on tenterait un troisième pour la fille (on ne juge pas, j’assume). Et c’est drôle parce que tout en me découpant, le chirurgien me parlait du troisième. C’est aussi ce dont m’a parlé la gynéco en post partum. Malgré tout, il y a un risque que je refasse cette complication. Sauf que chez moi, c’était vraiment atypique (au point que la gynéco doute même du diagnostique) donc personne ne peut mesurer le risque (ben 1% c’est pas 50%). En plus visiblement, j’ai eu du bol qu’on l’ai détecté à temps, donc la prochaine fois, ben il pourrait y avoir des complications plus grave (genre perdre son foie, son enfant ou sa vie). et j’aurai forcément une grossesse plus suivie (donc hyper angoissée). Et je ne suis pas sure de pouvoir repasser par la case néonat. Et je ne suis pas sure d’assumer une grande prématurité avec les séquelles que ça peut impliquer juste parce que je voulais une fille (alors que je sais bien que le troisième, si troisième il y a , sera un garçon)
Je pense que chaque chose doit se faire en son temps quand on a vécu une épreuve pareille. Je sais qu’une fois que j’ai un peu digéré les choses, j’ai pris un rdv avec l’hôpital où j’ai accouché pour voir mon dossier et surtout discuter de ce qui s’était passé, de mon fils, de comment pourrait se passer le suivi pour une deuxième grossesse… Cela m’avait fait un bien fou. Est-ce que tu aurais éventuellement la possibilité de faire la même chose ? Cela m’a pas mal rassuré sur le risque de refaire la même complication, sur les explications de ce qui c’était passé pendant ma grossesse. Cela n’a pas tout changé, mais ça a été une étape importante.
Oui je pense que ça serait possible pour moi aussi.
L’obstétricien qui m’a accouché m’avait dit que je pourrais revenir le voir.
Tu as raison, chaque chose en son temps^^