Ce matin ça commençait mal. Réveil avec mal de tête, mal au dos, cet espèce de torticolis qui va et vient depuis ces dernières semaines. Les 3 garçons à préparer seule comme tous les matins, timing millimétré, mais ça passe. Je me dis qu’on part pas si mal.
Comme d’habitude après avoir posé les petits à la crèche, il y a du monde sur la route pour aller à l’école. J’ai craqué et embarqué la tétine dans la voiture, histoire de m’acheter un trajet plus tranquille. Bouchons interminables. La tétine qui tombe entre deux sièges dès les premiers ralentissements. Début des hurlements. On arrive à l’école, on cherche partout les lunettes oubliées la veille. Introuvables. Tant pis.
Je rentre chez moi, direct au lit. Le mal de crâne qui ne m’a pas quitté me martèle les tempes. Je comate d’un sommeil fiévreux, à me dire que c’est une nouvelle journée où je ne ferais pas assez de choses. Pas trop faim, je grignote la fin d’une barquette de framboises achetée hors saison car elles me faisaient trop envie. Et qui bien sûr n’ont pas trop de goût. Bam, je tombe sur un paquet de gâteaux qui y passe. Idiot.
Le portable qui sonne. Numéro inconnu. Le genre de trucs où tu ne décroche jamais, moi j’attends toujours qu’on me laisse un message d’abord, puis j’avise. Mais là va savoir j’ai décroché. “Allo ? Le service de neurochirurgie, on a eu les résultats du scanner de votre fils, on vous passe le docteur”. Donc effectivement, il y a un truc qui cloche. Ha. C’est plus complexe que ce qu’on pensait. Ha. Vous réfléchissez à propos de l’opération et vous me rappelez. Ha. Tu raccroches avec les doigts morts, le cœur qui se ratatine au fond de la poitrine. Tu réalises qu’une fois de plus on t’a rien expliqué vraiment, qu’il faut que tu te démènes pour rassembler un peu les maigres informations que tu as et essayer de comprendre les tenants et les aboutissants de tout ce qui te tombe sur la gueule une fois de plus.
C’est déjà l’heure de partir en fait. C’est vrai qu’on est mercredi, et que le mercredi c’est centre de loisirs, et qu’au centre de loisirs on te demande de venir le chercher plus tôt. Parce qu’il n’est pas possible d’avoir une aide sur ces temps là, alors on s’adapte, malgré l’éternel pincement au cœur. T’attrape tes clefs, le téléphone. “Allo, c’est le centre de loisirs. Votre fils est un peu malade, la gastro sûrement”. Ha. Je partais j’arrive.
Je déboule au milieu du carnaval du centre, mon petit ours brun a désormais un pantalon bleu, ça gâche un peu le déguisement. Mais il est en pleine forme et tout heureux d’être là, alors malgré mes yeux enfoncés dans le fond de mes orbites d’avoir trop pleuré je lui souris. Une petite fille de l’école primaire s’approche de nous. “Il est handicapé ?”. Je la regarde. Je voudrais être ailleurs. J’hésite, je regarde mon fils, je cherche du regard quelqu’un qui pourrait m’aider. Je dois lui répondre, je dis “oui, il est atteint de handicap”. Je la plante là, je ne sais pas quoi dire de plus de toute façon.
Avant de quitter la salle, une autre petite fille, de la maternelle, qui s’approche pour me parler. Mes mâchoires se contractent. “Il est invité à l’anniversaire ce week-end”. Oui, c’est vrai, un petit camarade qui fête ses 4 ans et mon grand est invité. Elle ajoute dans un grand sourire en regardant mon garçon “il est trop mignon”.
Je termine cette journée brisée, une nouvelle fois, enfilant encore et toujours les perles des probabilités improbables, et pourtant demain il faudra se lever. Mes larmes seront très douloureuses dans les semaines à venir, encore, toujours. Mais on va essayer de parfois se souvenir de ça. Les invitations aux anniversaires de ce petit mignon.
19 comments
Que dire… Mais c’est vrai qu’il est trop mignon. Je pense bien à vous.
Merci Mady <3
Je voudrais trouver les mots, vous offrir une tasse de thé et vous tenir la main. Je connais trop ces soirs où en s’endormant on se demande si on aura la force de ce lever le lendemain pour affronter une nouvelle journée. Les matins les plus difficiles, ceux qui annonce une rude journée d’hôpital, je me lever et j’enfile la cape… Celle de super maman, sourire plaqué sur les lèvres jusqu’au retour à la maison. Cette cape, vous l’avez aussi, demain chercher la bien dans votre dressing… Elle n’empêche pas de pleurer, elle n’épargne pas la douleur, elle n’apporte pas plus de patience… Elle est juste tissé de fils d’amour… Juste ce dont votre adorable garçon a besoin.
Merci beaucoup Cecile pour ce si gentil message. Courage à vous aussi, avec et sans votre cape !
Bonjour, comme beaucoup je pense je lis votre blog en sous marin depuis longtemps sans commenter mais tjs avec intérêt parce parfois ce je vous dites me parle directement et parfois non mais ça m’intéresse quand même!!Depuis quelques semaines les questions de handicap et tout ce que ça implique pour l entourage me concernent plus car j’ai du subir une interruption medicale de grossesse en janvier et laisser partir ma petite fille qui était atteinte de malformations renales très graves. Je vous comprends, j’aimerai vous dire que j’ai des pistes pour vous aider mais pas vraiment si ce n’est que de mon côté je vois une psychologue qui m aide pas mal.je sais pas si vous en voyez une dans notre nouvelle vie dans le sud ouest mais si vous trouvez un peu de temps je vous le conseille. Ça solutionne rien mais ça aide à mieux vivre les choses et ca permet de saccorder un peu de temps à soi meme…C’est dérisoire mais je vous envoie plein de courage…
Merci beaucoup pour votre gentil message Julia, ça me touche beaucoup. Effectivement il faudrait que j’arrive à me dégager du temps pour reprendre un suivi ici oui. Je vous souhaite beaucoup de courage dans l’épreuve que vous traversez, une grande pensée pour votre étoile.
Je me permets d en rajouter une « couche » parce qu’en relisant certains de vos posts je me retrouve dans ce que vous exprimez sur le fait d’être un peu/ beaucoup seule a y penser tout le temps et ce sentiment d avoir tjs une petite voix qui vous dit « on s’en fout » du reste. J’ai pour ma part entamé une correspondance avec une autre femme qui a également eu une IMG, nos vies sont très différentes mais nous avons ça en commun, les même angoisses, les mêmes hauts et bas et c’est un peu devenue notre soupape cette correspondance mail. Les trucs qu’on peut pas dire à son conjoint et à ses proches car ça fait 200 fois qu’on rabâche les même trucs mais que ça passe pas. Par ailleurs la psychologue que je vois à mis en place des groupes de paroles de parents endeuillés, c’est pareil ça aide. On pourrait dire que ça m enferme la dedans mais enfait c’est plutôt le contraire, comme je peux me lâcher dans ces espaces de discussions finalement à côté je suis plus légère et je ressasse moins… il existe sûrement ce type de choses pour les parents ayant un enfant porteur d’un handicap, c’est pas tjs facile à trouver mais de la même façon que la psy ça peut peut être vous amener un peu de soutien. Bon j’arrête de vous embêter ! Bonne journée
Effectivement, je corresponds avec plusieurs personnes qui vivent des situations similaires et c’est vrai que « ça fait du bien » de partager avec des personnes qui comprennent ce qu’on vit. Après, c’est dans le quotidien où je trouve que c’est plus dur à gérer, avec nos proches, je ne sais pas si ça vous fait la même chose…
Oui en effet déjà avec mon conjoint on ne le vit pas de la même façon, ou du moins on a pas les mêmes besoins en terme de verbalisation, soutien… Et avec les proches j’ai eu toutes les réactions possibles, ceux qui sont présents et prévenants ,ce qui font l autruche, ceux qui minimisent… à l’hôpital on m avait dit que ce type d épreuve rebattait souvent les cartes de nos relations.. ça se vérifie pour moi.
Du courage, pour cette (peut être) opération à venir, et pour ce quotidien parfois rose, parfois un peu moins ❤
Anais
Merci beaucoup à toi <3 On a hâte que cette épreuve soit derrière nous...
Ton post m’a mis les larmes aux yeux.
Je ne sais que te souhaiter mais je pense bien à toi, à lui. Et suis ravie qu’il puisse vivre des anniversaires comme tous les autres.
Merci <3
J’ai trouvé cet article si difficile, je n’ai pas su quoi écrire en commentaire… J’espère très fort que tout ira bien et qu’il sera encore invité à des dizaines d’anniversaires.
Merci <3
Bonjour,
cela fait un moment que je vous suis. Je me decide enfin de vous ecrire….En effet mon fils a maintenant 2 ans et ses débuts de vie on été très difficile.
Bébé né à terme. Au bout de 12h on observe une insuffisance respiratoire et une impossibilité à la déglutition. Il est enmené en néonat et on lui pose une sonde naso-gastrique qu’il gardera 6 mois. Il aura également une VNI pandant 18 mois.
Diagnostique PATHOLOGIE NEUROMUSCULAIRE NON ETIQUETEE NEONATALE. Hospitalisation de 2 mois. Et retour à la maison avec une hospitalisation à domicile d’un mois (car nous voulions tout savoir faire pour vivre un peu normalement…). Je vous passe tout les examens à l’hôpital, le stress, les pleurs, l’angoisse, l’incompréhension, la culpabilité, la colère, la peur etc….
Maintenant nous avons des visites de contrôl mais rien de plus. Actuellement tout va bien les medecins ne comprennent pas ce qu’il s’est passé. Cependant il ne mange pas encore de morceaux.
Quand je vous lisais concernant votre aîné, je me voyais et cela me faisais beaucoup de bien…merci.
Suite à ce post, je voulais vous souhaiter beaucoup de courage…
Nous pensons à faire le deuxième enfant. Je vous laisse imaginer la peur…comment avez vous fait ?
Ont-ils beaucoup d’ecart d’âges ?
Merci
Bonjour Adeline, merci pour ce message et je suis contente de lire que votre fils va mieux aujourd’hui. Même si j’imagine bien l’angoisse que c’est de ne pas avoir de « réponses » pour tout ça… Mon grand a 2 ans 1/2 d’écart avec ses petits frères, je comprends bien votre peur car elle a été présente ici aussi mais… Un jour l’envie d’agrandir la famille est plus forte que la peur, j’espère qu’il en sera de même pour vous.
Merci pour votre réponse….
je vous souhaite du bonheur et pleins de bonne choses pour vos 3 garçons !