La marche

Fin de semaine. Je rentre à la maison. Je suis accueillie comme toujours par les sourires de mon fils, en train de manger avec son papa. Qui m’annonce que ce fiston est un champion. Qu’aujourd’hui à la crèche, il s’est mis debout tout seul, et qu’il a trottiné partout. Je suis ravie bien sûr, ça s’enclenche cette histoire de marche ! On le savait, il avait tellement envie ces derniers jours… Mais je savoure cette bonne nouvelle comme souvent : je suis contente, mais la marche définitive, je sais que ça viendra petit à petit.

Et là, le petit choc. Petit chat a fini de manger, et à peine sorti de sa chaise haute haute, il s’avance vers moi pour un petit câlin. Puis il repart vers son père. Pas une hésitation, pas d’équilibre vacillant. Il avance droit devant lui d’un pas conquérant. La marche est à lui.
Je ne vous explique pas la demi-heure qui a suivi. Moi, béate d’admiration, en train de me déplacer dans tout notre salon pour voir jusqu’où mon fils me suivrait. Et lui qui me suivait partout, et que je m’arrête, que je repart, que je change de direction. Qui m’a même montré comment il se relevait seul, debout, stable. Mon fils. La marche. Ses petits bras en l’air pour assurer son équilibre, ses petits pieds qui se posent fermement sur le sol.

Je n’ai jamais réellement pensé qu’il ne marcherait pas. Je l’ai su, toujours, que cette étape serait franchie, et même pas si tardivement que ça. Mais vous le savez, cette intime conviction face aux angoisses… On y est pourtant, il a 20 mois, et il marche. Et quand même. Je ne vous cacherais pas le poids énorme que j’ai en moins sur le coeur ce soir. Ce moment où je suis rentrée dans la douche, cette douche sous laquelle je pleure tous les jours depuis des mois, et où j’avais un immense sourire. Et même la sensation, pendant quelques minutes, d’un bonheur total. Je la chéris cette sensation, elle est si rare.

Je sais bien que peut-être que demain il ne marchera pas autant, ou aussi bien. Que peut-être même pendant quelques jours il ne voudra plus marcher. Que ses progrès continueront à son propre rythme, qu’il a son propre tempo.

Mais non, je vous dis ça et en fait, je sais. Mon fils marche. Et là tout de suite, je suis sur mon petit nuage.